Le GRHis lance le GRIM
Le GRHis propose la création d’un Groupe de Recherches Interdisciplinaires sur les Mazarinades (GRIM). L’objectif est de poursuivre le développement d’une collaboration internationale entamée en 2013, de multiplier les approches interdisciplinaires du corpus pamphlétaire le plus riche de la France d’Ancien Régime, et de poursuivre son instrumentation électronique en s’appuyant sur l’expertise mise en œuvre dans les corpus numériques du Projet Mazarinades (RIM) et de la Gazette (Haffemayer) pour donner aux chercheurs de nouveaux outils d’analyse.
Principaux membres du projet, par ordre alphabétique
- Amatuzzi Antonella, professeur de langue française à l’Université de Turin.
- Amigo Vazquez Lourdes, professeur d’histoire moderne à l’Université Complutense de Madrid.
- Abiven Karine, maîtresse de conférences en langue française et analyse du discours, à Sorbonne Université/UR STIH, membre associée au CEREdI, Rouen Normandie.
- Bordes Laura, doctorante, Université d’Aix-Marseille
- Cogné Virginie, doctorante, Université du Québec, Montréal.
- Étienne Baptiste, Responsable de la bibliothèque patrimoniale d’Avranches. Paléographe.
- Ferri Laurent, conservateur à la bibliothèque de l’Université de Cornell.
- Folliard Melaine, professeur agrégé, docteur de l’université d’Aix-Marseille.
- Graillat Céline, doctorante, Université de Fribourg.
- Haffemayer Stéphane, coordinateur du GRIM au sein du GRHis, professeur d’histoire moderne, Université de Rouen-Normandie.
- Ichimaru Tadako, co-fondatrice RIM (Recherches Internationales sur les Mazarinades), chargée de cours, Université Gakushuin (Tokyo, Japon).
- Klaus Carrie, professeure d’études françaises globales, Université DePauw (États-Unis).
- Klos Édouard, Professeur agrégé d’histoire, doctorant en histoire moderne, Lyon 2. Membre du LARHRA, UMR 5190.
- Malinowski Teresa, docteure en histoire moderne, Université Paris Nanterre, Université Adam Mickiewicz de Poznan.
- Matsumura, Takeshi, professeur de langue française à l’Université de Tokyo (Japon).
- Mauran Philippe, éditeur des gazettes parisiennes de l’année 1653 d’Abraham de Wicquefort.
- Mellot Jean-Dominique, conservateur général à la Bibliothèque nationale de France.
- Nédelec Claudine, professeur émérite à l’Université d’Artois.
- Poncet Olivier, professeur d’histoire des institutions, diplomatique et archives de l’époque moderne, École Nationale des Chartes.
- Rebollar Patrick, co-fondateur RIM, professeur titulaire, Université Nanzan (Nagoya, Japon).
- Ronzeaud Pierre, professeur émérite de littérature française à Aix-Marseille Université.
- Tribout Bruno, Reader, University of Aberdeen.
- Tsimbidy Myriam, Professeur de Littérature du XVIIe siècle à l’Université Bordeaux-Montaigne.
- Vellet Christophe, Responsable du service Patrimoine imprimé, Bibliothèque Mazarine.
PRÉSENTATION DU PROJET GRIM
Le répertoire théorique des mazarinades comprend environ 6 000 éditions produites sous la Fronde entre 1648 et 1653 ; longtemps considéré comme un « océan » (Christian Jouhaud), un « labyrinthe » (Michel de Certeau) ou un « déluge » (Hubert Carrier), ce corpus de libelles d’une exceptionnelle inventivité littéraire eut aussi une redoutable efficacité politique, qui ébranla les autorités monarchiques. Quelques années plus tôt en Angleterre, le déluge d’imprimés qui accompagna la guerre civile interrogeait la société sur l’origine et la nature du pouvoir, résonnant fortement dans la France frondeuse, hostile à l’absolutisme comme aux idées républicaines. Accompagnant les crises politiques, l’explosion de l’imprimé politique au milieu du XVIIe siècle constitue un phénomène européen d’une ampleur inédite qui interroge les rapports entre la société et l’État.
Après les descriptions bibliographiques réalisées au XIXe siècle par Célestin Moreau[1] et ses continuateurs, les travaux réalisés dans les années 1980 par Christian Jouhaud et Hubert Carrier ont marqué une étape essentielle de la recherche française et internationale. Pourtant, depuis une vingtaine d’années, le champ historiographique de l’information et de la communication en contexte de crise politique s’est fortement renouvelé du fait de la multiplication des études sur le discours pamphlétaire et les médias. Grâce à la numérisation, de plus en plus de mazarinades sont devenues accessibles en ligne sur Gallica, Europeana, Archives.org, Google Books, sites sur lesquels l’information bibliographique n’en demeure pas moins éparse et souvent peu fiable. En outre, peu à peu, les nouvelles technologies et les possibilités offertes en matière de conception de bases de données et d’instrumentation électronique ont fait naître d’autres questionnements qui permettent d’élaborer de nouveaux protocoles d’investigation de volumineux corpus[2], comme cela a pu être mis en œuvre avec les nouvelles de la Gazette[3] ou le Projet Mazarinades.
Les ambitions du GRIM s’inscrivent dans cette évolution marquée par le renouvellement de l’instrumentarium offert aux chercheurs, qu’il s’agit désormais de concrétiser et d’offrir en modèle de référence à la communauté internationale et aux études interdisciplinaires.
Depuis 2010, l’équipe franco-japonaise des RIM, soutenue par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche du Japon, développe le Projet Mazarinades, visant à l’édition électronique et à l’analyse des mazarinades[4], à partir d’une collection de 2 709 Mazarinades à la Bibliothèque de l’Université de Tokyo (achetées en 1978 par le gouvernement japonais pour un montant de 40,5 millions de yens, soit l’équivalent de 450 000 euros). L’édition scientifique de ce corpus selon le standard d’encodage XML-TEI[5] est publiquement disponible depuis 2011 ainsi qu’un portail d’informations et de documents historiques, dont une page de géolocalisation mondiale des collections de mazarinades.
Par la suite, la Bibliothèque Mazarine, dans le cadre de la politique européenne[6] d’accès aux œuvres conservées au sein des institutions patrimoniales culturelles, a ouvert un portail numérique « Mazarinum » en 2015[7] pour favoriser l’accès de la communauté scientifique internationale à ces sources – principes FAIR – grâce notamment à une coopération avec la plateforme de recherche Isidore[8] et le dispositif d’agrégation de contenus Europeana[9] (avec la BnF). Elle y propose actuellement plus de 800 mazarinades dont le texte est intégralement téléchargeable et interrogeable. Mais surtout, s’appuyant sur le catalogage scientifique de la plus importante et plus complète collection au monde, disposant des papiers et notes scientifiques de Hubert Carrier et prenant en compte les publications plus récentes, la Bibliothèque Mazarine a entrepris de réaliser un projet que H. Carrier n’avait pu mener à bien, une nouvelle bibliographie des mazarinades de référence destinée à remplacer celle de Célestin Moreau, concrétisé dans la base en ligne Bibliographie des Mazarinades BM lancée en 2019[10] et en cours d’enrichissement.
Cette évolution épistémologique nécessite de rapprocher les disciplines, de confronter des traditions scientifiques à l’échelle internationale, de faire dialoguer des modes d’analyse, de tester la complémentarité des méthodes, pour mieux comprendre les usages politiques d’un média en temps de révolte. Le corpus du Projet Mazarinades constitue aujourd’hui un ensemble documentaire bien identifié et qui intéresse des historiens, des littéraires, des sociologues, des linguistes, des musicologues, des conservateurs, des collectionneurs, des bibliophiles savants.
De premières collaborations internationales ont commencé à se former lors d’un colloque organisé à Paris en 2015, fruit d’un partenariat entre les RIM, la Bibliothèque Mazarine et la Bibliothèque nationale de France[11] ; elles se sont poursuivies en 2016 avec l’organisation du colloque des RIM à Tokyo[12] puis en 2020 avec la programmation du colloque de Cerisy qui n’a pu se tenir du fait de la crise sanitaire et qui s’est tenu à Rouen en septembre 2022, avec vingt-trois contributions, grâce au partenariat entre le GRHis & le groupe des RIM.
La pertinence du positionnement actuel de ces travaux de recherche s’appuie sur des thèses en cours et sur des soutenances récentes (voir catalogue) ainsi que, depuis 2019[13], sur de nouvelles numérisations de fonds patrimoniaux (voir la collection de la Mazarine dans le site Mazarinum).
Les nouvelles approches que nous développons depuis 2015 démontrent que les Mazarinades dépassent de loin le cadre de la Fronde, qu’elles ouvrent vers d’autres espaces historiques ou politiques, qu’elles mobilisent une histoire des types de discours, des modes langagiers, des genres littéraires, des formes poétiques ou théâtrales, des topiques culturelles contemporaines, dans un processus à double sens : éclairant, en contexte, certains aspects de l’écriture des mazarinades et donnant à voir l’instrumentalisation des modèles esthétiques ou culturels en situation polémique.
Le projet du GRIM se situe à trois niveaux :
- Rassembler une information bibliographique éparse et poursuivre la mise en ligne d’un nombre croissant d’éditions scientifiques de mazarinades dématérialisées et de leurs métadonnées. C’est précisément ce à quoi avait appelé Hubert Carrier en 1989 : une bibliographie complète et exacte, et une équipe de chercheurs.
- Passer de l’édition à l’instrumentation électronique en permettant aux chercheurs/lecteurs de multiplier les requêtes sur les textes, tant sur les métadonnées que sur le contenu, de manière comparable à ce qui a été fait avec les nouvelles de la Gazette de Renaudot pour les années 1683, 1685 et 1689[14].
- Enfin, il entend développer une collaboration internationale à l’échelle de la dispersion patrimoniale des fonds de mazarinades sur plusieurs continents et dans une perspective interdisciplinaire. Le renouveau historiographique inauguré par les colloques de Paris (2015), Tokyo (2016) et Rouen (2022), incarné par la présence de jeunes chercheurs issus de disciplines différentes, est à poursuivre sous la forme de rencontres scientifiques triennales, dont l’organisation sera confiée à de jeunes chercheurs. Le prochain colloque ou journée d’études se tiendra en 2025 selon des modalités qui restent à préciser.
Publications et diffusions issues des colloques de Paris (2015), Tokyo (2016), Rouen (2022) organisés dans le cadre des RIM
- Mazarinades, nouvelles approches, « Histoire et Civilisation du Livre, Revue Internationale », vol. 12, 2016. Dossier édité par Stéphane Haffemayer, Patrick Rebollar et Yann Sordet, 393 p.
- L’exploration des mazarinades / マザリナード探求” [Mazarinādo tankyū], édité par Tadako ICHIMARU, textes traduits par Yuko NAKATSUMI, 2021, actes du colloque éponyme du 3 nov. 2016 à l’Université de Tokyo], Tokyo, éd. Projet Mazarinades, 193 p.
- Lien vers les vidéos du colloque de Rouen, septembre 2022 :
- https://webtv.univ-rouen.fr/permalink/c12640c47ffa223kf2ka/
- http://mazarinades.org/2022/10/diffusion-du-colloque-mazarinades-et-territoires-7-9-septembre-2022/
[1] Célestin Moreau, Bibliographie des mazarinades, Paris, Jules Renouard, 1850-1851, 3 vol.
[2] https://quod.lib.umich.edu/j/jahc/3310410.0002.103/–data-processing-and-the-analysis-of-gazettes-from-the-ancien?rgn=main;view=fulltext
[3] Stéphane Haffemayer : https://www.unicaen.fr/gazette/presentation.php
[4] Pour l’historique du projet, se référer à http://mazarinades.org/presentations-et-droits/. Les financements obtenus sont : de 2010 à 2013 – JSPS Kakenhi n° B-22320066, de 2014 à 2017 JSPS Kakenhi 2014-2017, C-26370364, puis de 2019 à 2020 Kakenhi 2019-2020, 19H01246
[5] Libres de droits et accessibles en ligne depuis 2010 (voir le Projet Mazarinades à http://mazarinades.org, avec corpus, catalogue, moteur de recherche plein texte et métadonnées bibliographiques et critiques)
[6] https://pro.europeana.eu/about-us/mission
[7] https://lalist.inist.fr/?p=15189 et https://bbf.enssib.fr/le-fil-du-bbf/lancement-de-la-bibliotheque-numerique-de-la-bibliotheque-mazarine-28-05-2015
[8] https://humanum.hypotheses.org/1651
[9] https://classic.europeana.eu/portal/fr?utm_source=new-website&utm_medium=button
[10] https://mazarinades.bibliotheque-mazarine.fr/
[11] Voir sa publication en 2016 : Stéphane Haffemayer, Patrick Rebollar, Yann Sordet, « Mazarinades. Nouvelles approches », Histoire et Civilisation du livre. Revue Internationale, n°12, Genève, Droz, 2016.
[12] L’exploration des Mazarinades [publication en japonais et en français], Tokyo, RIM, 2021, 193 p., 100 exemplaires papier et accessible en ligne en livre numérique (format Kindle), voir http://mazarinades.org/2019/05/colloque-tokyo-2016-stephane-haffemayer/
[13] https://mazarinum.bibliotheque-mazarine.fr/a-propos/article/6-Eumazarinades