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AAC/CFP Au croisement du politique et du militaire : décider en guerre, des campagnes de Louis XIV à l’âge des Révolutions.

Date / Heure
Date(s) - 22/05/2022
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Résumé

La prise de décision constitue, au sein d’un conflit, un jalon essentiel où l’imbrication entre politique et militaire est sensible. Ce processus met en lumière l’interaction entre différents acteurs et ce, à plusieurs échelles d’analyse de la guerre : stratégique, opérationnelle et tactique. L’enjeu de ce colloque est d’englober l’ensemble de la période allant des campagnes de Louis XIV jusqu’à l’âge des Révolutions, dans le but de faire dialoguer des historiographies qui restent temporellement cloisonnées. En effet, on observe une évolution du rapport entre les instances politiques et la conduite de la guerre dans la seconde modernité. Celle-ci se pose avec une particulière acuité pendant la Révolution française. La tension entre politique et militaire se joue, d’une part, dans le saisissement de la direction des opérations par des civils, et d’autre part, à travers les tentatives de subordination du pouvoir politique par les militaires. Il s’agit ici d’étudier aussi bien les modalités de la prise de décision que son exécution et ses formes d’application.
Le Service historique de la Défense, l’IHMC (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) et le GRHis (Université Rouen Normandie), la Société des études robespierristes, organisent les 24 et 25 novembre 2022 au château de Vincennes un colloque international intitulé « Au croisement du politique et du militaire : décider en guerre, des campagnes de Louis XIV à l’âge des révolutions ».

Argumentaire

Bien avant les guerres révolutionnaires, l’imbrication entre politique et militaire est déjà perceptible dans la prise de décision. Celle-ci désigne un moment paroxystique qui donne à voir une variété d’interactions, depuis les cercles du pouvoir jusqu’aux commandants d’unité. Cette interaction peut s’exprimer aux différentes échelles d’analyse de la guerre, qu’elles soient stratégique, opérationnelle ou tactique. À cet égard, l’intromission du politique dans le militaire se constate à diverses occasions, aussi bien à travers l’exécution de l’amiral britannique Byng après la bataille navale de Minorque en 1756, que dans la conduite de la campagne des Flandres de 1794 par la République. Force est d’admettre un jeu d’influence entre les deux sphères, qui se décline depuis le saisissement de la direction des opérations par des civils à l’instar des comités de gouvernement durant la Révolution française jusqu’aux tentatives de subordination du pouvoir politique par les militaires. En effet, le poids public de la noblesse militaire sous l’Ancien Régime, la définition de l’état de siège en 1791, ou la crainte exacerbée du césarisme des généraux sous le Directoire mettent en lumière l’importance des spécialistes de la guerre dans la dimension politique de la prise de décision.
Or, si parmi les renouvellements à l’œuvre dans l’étude du fait guerrier, la place accordée au rapport entretenu entre politique et militaire a bénéficié d’un certain regain d’intérêt, l’historiographie reste cloisonnée, notamment temporellement. Ce colloque se propose donc d’interroger sur un temps plus long les évolutions de la prise de décision militaire. Dès les guerres de Louis XIV, les bureaux de Versailles tendent progressivement à peser sur la conduite de la guerre, comme a pu le montrer l’étude récente de Jean-Philippe Cénat sur Chamlay. Cette tension entre politique et militaire traverse le XVIIIe siècle et trouve son apogée avec l’idée de nation en armes et de souveraineté populaire. L’irruption du politique durant les guerres de la Révolution française a été questionnée à l’échelle tactique par John Lynn, à l’échelle opérationnelle par Michel Biard avec son ouvrage Missionnaires de la République, et dans les ports avec William Cormack (Revolution and Political Conflict in the French Navy 1789–1794). Enfin, avec le règne de Napoléon on aboutit à l’identification complète des registres militaires et politiques ce qui n’est pas sans inspirer notamment les acteurs des indépendances américaines.

Axes

  • La décision militaire à l’épreuve de l’espace et du temps. La dilatation de l’espace des guerres durant la seconde modernité, avec un aspect mondial des conflits bien marqué dès la guerre de Sept Ans, est un fait nettement établi par l’historiographie. Néanmoins, l’étude des pratiques concrètes de prise de décisions militaires n’ont pas toujours intégré ce renouvellement. Il importe de penser comment l’articulation de champs de bataille distants les uns des autres est envisagée par les acteurs, tout comme la gestion de la réception de l’information, selon des temporalités différentes en fonction des continents et des océans impliqués. Le décloisonnement des études sur la seconde modernité et l’âge des Révolutions est susceptible d’être fructueux, le souci d’une histoire du fait guerrier à l’échelle mondiale disparaissant parfois dans l’historiographie des conflits de la Révolution et de l’Empire, en tout cas en ce qui concerne les publications en langue française.
  • Concevoir, débattre et arrêter la décision militaire. Entre le règne de Louis XIV et l’âge des Révolutions, les modalités de la prise de décision militaire ont évolué de manière significative. Mais depuis le cœur des bureaux de Versailles au Comité de salut public, la direction des opérations a toujours été un facteur de débats. Avec la création du Dépôt de la guerre notamment, l’État s’assure une forme de continuité dans la connaissance des campagnes militaires précédentes et des divers théâtres d’opérations. Seuls les acteurs et leurs motivations ont changé, du roi et ses ministres aux députés de la Convention. D’un régime à un autre, il est donc nécessaire ici d’analyser le processus de la prise de décision militaire, de son élaboration à ceux qui en ordonnent l’exécution, et de vérifier si, d’une manière ou d’une autre, les changements de concepts politiques ont influé sur ce processus.
  • Surveiller et contrôler l’application de la décision militaire. La période de la seconde modernité en Europe voit la forte croissance des effectifs des armées. Celles-ci doivent être gérées par des appareils administratifs toujours plus complexes et minutieux. Ainsi, si le contrôle de l’État sur son armée s’est fortement accru, en est-il de même pour la direction stratégique, opérationnelle et tactique ? La question se pose d’autant plus dans la période qui nous intéresse. En effet, on assiste à la fin de la présence des souverains sur les champs de bataille et la naissance de la « guerre de cabinet », mais aussi, avec l’âge des Révolutions, au souci d’une véritable soumission de l’appareil militaire à des régimes politiques nouveaux. L’objectif ici est donc d’analyser les différentes modalités de contrôle des États sur la direction de la guerre, du système militaire installé par Louis XIV aux représentants en mission de la Révolution française.
  • Pratiques transactionnelles et confrontation avec l’ennemi : la prise de décision à l’échelle tactique. Les guerres de la période moderne donnent lieu à de multiples rencontres entre belligérants dans une perspective d’économie de moyens. Présentant des formes de régulation de la violence, ces pratiques, qui tendent à se normaliser, ne mettent pas moins en tension des antagonistes défendant des intérêts parfois, voire souvent, irréconciliables. Il s’agit ici de percevoir les décisions anticipant et pouvant résulter de ces moments d’échange et de tractation, entre tentatives pour épargner du sang et des ressources, recours aux menaces plus verbales que physiques, et confrontation des régimes politiques. À cet égard, la reddition honorable constitue, à partir du XVIe siècle et pour le dénouement des sièges, un de ces usages négociés. De même, les cessez-le-feu ou les échanges de prisonniers sur le champ de bataille peuvent être perçu comme autant de moments entre dialogue et défiance où la prise de décision s’avère cruciale.

Modalités de soumission

Les propositions de communication doivent être soumises au format PDF avant le 22 mai 2022, comprenant une présentation de la communication de 3000 signes maximum (espaces inclus),
accompagnée d’une brève présentation personnelle (nom et prénom, unité de recherche, rattachement administratif).
Les propositions sont à envoyer à l’adresse suivante : deciderenguerre@gmail.com Réponse aux auteurs le 26 juin 2022.
Comité d’organisation :

  • ARANDA Olivier, doctorant, IHMC, Université Paris 1-Panthéon-Sorbonne.
  • BARBARAY Côme, doctorant, GRHis, Université de Rouen Normandie.
  • BARRIER Valentin, doctorant, IHMC, Université Paris 1-Panthéon-Sorbonne/Ministère des Armées.

Comité Scientifique :

  • BIARD Michel, professeur, GRHis, Université de Rouen Normandie.
  • DREVILLON Hervé, professeur, IHMC, Université Paris 1-Panthéon-Sorbonne.
  • GAINOT Bernard, maître de conférences honoraire, Université Paris 1-Panthéon-Sorbonne

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